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En contrebas, car il fallait encore descendre deux marches hautes pour en atteindre le plain-pied, se découvraient les deux nefs jumelles d'une salle basée sur un carré approximatif d'une douzaine de mètres de côté. Les voûtes de ces nefs, de deux travées chacune, aux berceaux surbaissés, s'appuyaient sur neuf piliers trapus dont l'un marquait le centre du carré, les huit autres étant pris dans la maçonnerie des murs. L'une des nefs, sur le flanc gauche de laquelle débouchait le couloir où je me trouvais encore, se terminait en cul-de-four, tandis que l'autre présentait un chevet plat percé d'une ouverture qu'habillait une portière semblable à celle qui me servait de refuge.

J'étais en présence d'une crypte carolingienne d'assez belles proportions. L'harmonie générale semblait pourtant en être troublée par un tassement structurel, comme sous le poids des ans. En fait, la raison était autre que celle d'un affaissement imputable au temps : bien qu'un dénivelé subsistât entre le sol du couloir et celui de la salle, ce dernier avait cependant fait l'objet d'un rehaussement. Les piliers en apportaient la preuve car, s'ils s'ornaient par ailleurs de chapiteaux grossièrement ouvrés, les bases, elles, demeuraient absentes ou du moins invisibles, de telle sorte que les fûts cylindriques donnaient l'impression de s'enfoncer dans le pavement de vieux marbre fané. Il eût fallu creuser pour retrouver le sol d'origine et restituer à l'ensemble sa noblesse primitive.

En ce point de mon récit, un plan ne serait pas inutile. La représentation qu'il donnerait du lieu décrit permettrait de corriger et compléter ce que les mots n'ont su dire sans insuffisance ni maladresse. Un autre plan pourrait, quant à lui, préciser l'emplacement de la crypte dans le sous-sol de Saint-Sulpice, car je ne pouvais douter, mon cheminement l'attestait, qu'elle se trouvât enfouie quelque part sous l'église actuelle.

Mais il serait faux de penser que ces considérations architecturales s'imposèrent de prime abord à mon esprit. Jamais je n'aurais pu, à cet instant, faire semblable description, car la réalité qui s'empara de mes yeux lorsqu'ils se risquèrent de l'autre côté de la tenture, était autre et bien plus singulière.