1. Martine. a.

Martine et Pierre. Elle est l'héroïne. Lui jouera plutôt l'arlésienne. D'autant qu'il est parti, qu'il a quitté Martine. Pour une autre femme ? Hum ? Qui sait. Peut-être la suite nous l'apprendra-t-elle. Toujours est-il que nous sommes en plein drame. Un drame passionnel.

Pierre et Martine : le choix des prénoms n'a rien de fortuit mais évoque, selon l'auteur, une aventure où l'amour règne sans partage et sans histoire. Plus qu'une aventure. Une vie, toute une vie. Au point que la vie ne lui survit pas.

Dans l'esprit de l'auteur, l'alliance des deux, "Pierre et Martine", ou "Martine et Pierre", et bien qu'il ne sache dire pourquoi, - est-ce affaire de sonorités ? de réminiscences personnelles ? - renvoie aux grands amants inscrits dans notre imaginaire culturel, mais aussi aux petits amoureux des bluettes mélos de début du siècle, tout en convenant, toujours selon lui, à désigner un couple de tourtereaux d'aujourd'hui, ordinaire, banal.

Oui, vous avez sans doute raison. Il y a de l'arbitraire à vouloir établir de telles catégories dans un domaine où l'emporte la permanence du sentiment humain. Quant au choix des prénoms, il vous indiffère. Restons-en là.

Pierre a rompu, les faits remontent à plusieurs semaines. Les circonstances en sont donc déjà lointaines, elles se sont estompées et ne pourraient plus faire l'objet d'une reconstitution fidèle. Il est d'ailleurs inutile d'y revenir.

La période de crise qui s'en est suivie a connu des hauts et des bas sans que jamais les hostilités, déclenchées par Martine, unique belligérante - Pierre n'en étant plus à un forfait près -, ne connaissent un instant de répit. Le moment est venu du dénouement, mais il n'est question ni de paix, ni même d'armistice.

Martine a épuisé toutes les stratégies de reconquête.

Harpie vengeresse, elle a tenté la colère dévastatrice : Tu vas voir, je vais venir chez toi et je vais tout casser. Tu m'entends : tout !

Aguicheuse et minaudière, elle s'est essayée à la coquetterie : Ça y est ! Je me suis fait couper les cheveux. Exactement comme tu voulais ! Regarde sur les photos. Elles sont pas très bonnes, c'est des photomatons. J'avais mis mon petit débardeur. Sans rien dessous.

Tragédienne consommée, elle s'est laissée glisser au fond du désespoir : Si tu disparais de ma vie, je vais à mon tour disparaître de la tienne. Disparaître de la vie, simplement.

Fille d'Eve et du serpent réunis, elle a tâté d'armes moins nobles : Tu sais, mon oncle Maurice m'a donné des timbres pour ta collection. Très rares, il m'a dit. Tu viens les chercher quand tu veux. Ce soir, par exemple.

Finalement, parce qu'elle sait être à bout de ressources, et qu'elle ne peut pour autant se résoudre à accepter la défaite, Martine a décidé de tuer Pierre, et ce sera aujourd'hui.